« Il n’y a point de vent favorable pour celui qui ne sait où il va. » Sénèque.
Chers compatriotes, chers intellectuels, chers leaders politiques de toutes sensibilités,
Le débat sur la forme de l’État fédéralisme ou unitarisme alimente depuis plusieurs décennies la réflexion politique congolaise. Il vient à nouveau d’être ravivé par l’honorable Olivier Kamitatu, ancien président de l’Assemblée nationale, dans un plaidoyer assumé pour un État fédéral.
Permettez-moi, en toute humilité, de partager avec vous une lecture lucide, enracinée dans l’histoire de notre pays, la République Démocratique du Congo – ce grand Congo, mosaïque des peuples, des langues et des cultures, forgé dans la douleur mais aussi dans l’espérance.
Une question de forme… Ou de volonté politique ?
Le développement d’un pays n’est pas uniquement une affaire de structure étatique. Il est avant tout le fruit de la volonté politique, du patriotisme véritable, de l’abnégation et du courage de ceux qui gouvernent. Peu importe que l’on parle de fédéralisme ou d’unitarisme : le cœur du progrès réside dans la capacité à œuvrer pour le peuple, avec le peuple.
Mais nous le disons clairement : poser le débat sur la forme de l’État n’est ni un crime, ni une hérésie dans une démocratie. Bien au contraire, cela relève de la maturité politique. C’est l’exercice sain d’une élite consciente de son rôle historique. Ce débat doit toutefois être mené sans passion destructrice, sans diabolisation des avis divergents.
Une histoire ancrée dans la constitution et le sang des martyrs
Rappelons-le : la toute première constitution congolaise écrite par des Congolais la Constitution de Luluabourg (1964) prévoyait un État fédéral, dans un élan de reconnaissance de notre diversité. Cette dynamique fut brutalement interrompue par le coup d’État du maréchal Mobutu, instaurant un centralisme rigide.
Plus loin dans l’histoire, bien avant même l’indépendance, ce débat divisait déjà nos leaders. Joseph Kasa-Vubu, tenant du fédéralisme, et Patrice Émery Lumumba, fervent défenseur de l’unité nationale, s’opposaient sur cette question.
Deux figures majeures, deux visions différentes, mais une même volonté d’émanciper le Congo.
Or, ni le centralisme étouffant de Mobutu, ni les velléités sécessionnistes de 1960 n’ont permis d’atteindre l’idéal national. L’un a conduit à la rupture entre la capitale et l’intérieur ; l’autre a semé les graines de la méfiance, voire du repli identitaire.
La constitution De 2006 : Un Compromis mature
Aujourd’hui, nous disposons d’un texte fondamental d’une richesse indéniable : la Constitution du 18 février 2006, fruit des Accords de Sun City et du dialogue intercongolais. Cette constitution offre un équilibre subtil : un État unitaire, mais fortement décentralisé, intégrant les leçons du passé.
Cette décentralisation politique et non seulement administrative est une réponse intelligente aux aspirations des fédéralistes, tout en préservant l’unité nationale chère aux unitaristes.
Comme le disait le président Joseph Kabila Kabange, artisan de ce texte :
« Il n’y a pas d’État fort sans institutions fortes, il n’y a pas d’unité durable sans respect de nos diversités. »
Le débat est légitime, mais la priorité est ailleurs
Aujourd’hui, notre pays traverse des défis majeurs : insécurité persistante à l’Est, pauvreté criante, défi de l’éducation, crise énergétique, manque d’infrastructures de base. Le vrai débat doit porter sur l’efficacité des politiques publiques et la mise en œuvre intégrale de la Constitution existante.
« Gouverner, c’est choisir. » disait Pierre Mendès France. Et nous disons : gouverner, c’est aussi prioriser.
Au lieu de réécrire sans cesse nos structures, mettons plutôt en œuvre la décentralisation prévue, renforçons les provinces, responsabilisons les gouverneurs, dotons les territoires de budgets dignes de ce nom.
Appel à l’élite politique et Intellectuelle
Nous appelons nos dirigeants, actuels et futurs, à mettre en œuvre les réformes structurelles amorcées sous Joseph Kabila, car elles contiennent les germes d’une gouvernance moderne, inclusive et efficace.
« Le Congo est un géant endormi, que seule la volonté collective réveillera. »
Réveillons ce géant. Non par des querelles de forme, mais par des actes concrets. Ce n’est pas la forme de l’État qui fait la grandeur d’une nation, c’est la grandeur de ses femmes et de ses hommes d’État.
Tel est notre point de vue.
Pour un Congo fort, uni, décentralisé et réconcilié avec lui-même.
Jean Serge Tshiben Zakwisa,
Kabiliste inconditionnel, panafricaniste averti.